Fuyant les bombardements russes sur Kiev, Ludmila et son fils Ladislav, qui ont déjà connu un premier exil en 2015, ont trouvé refuge chez la famille Geffray depuis le 15 mars.

« Je suis fatiguée. Je ne me vois pas tout recommencer encore une fois. » Alors qu’elle était jusque-là dans la maîtrise, la voix de Ludmila se brise brutalement. L’émotion rattrape cette Ukrainienne qui a fui son pays le 6 mars et qui est arrivée à Poissy une semaine plus tard. Partie avec Ladislav, son fils malentendant, elle laisse derrière elle son mari, sa maison et l’entreprise qu’ils ont fondée. Ce nouvel exil fait douloureusement écho à celui qu’ils ont connu en 2015 quand ils ont dû abandonner leur vie à Donetsk après l’invasion russe du Donbass. Réfugiés à Kiev, les Zavertkin ont démarré une nouvelle vie, bouleversée, comme celles de tous les Ukrainiens, par la guerre déclenchée par la Russie le 24 février. « Au début, je ne pensais pas qu’ils bombarderaient Kiev. Jamais, avoue Ludmila, encore sous le choc. Mais quand les bombes ont commencé à tomber, ce n’était plus possible de rester : mon fils ressent les vibrations trop fortement. C’est pour lui que je suis partie. Mon mari a choisi de rester, il est prêt à mourir chez lui. »

Nouvel exil

Pour ce nouvel exil, cette fois hors de l’Ukraine, la destination s’impose d’elle-même : ce sera la France. « Je parle la langue même si j’ai arrêté de pratiquer depuis plus de vingt ans, avoue cette ancienne prof de français. Pour moi, c’était primordial de savoir que je pourrais communiquer. Et puis j’étais déjà venue en visite à Nice et à Paris, j’avais adoré. » C’est d’ailleurs grâce à son séjour en Ile-de-France, qui date de 2017, que Ludmila va voir s’ouvrir les portes de l’accueil en France. A l’époque, elle utilise les services d’un chauffeur VTC, Mourad, avec qui elle reste en contact par la suite. Quand l’Ukraine est envahie, il la joint pour avoir des nouvelles et quand elle arrive en France, c’est lui qui va l’aider à faire les démarches pour un hébergement en la conduisant en pôle social Simone-Veil de Poissy.

Après quelques nuits à l’hôtel, les agents du Centre communal d’action sociale la mette en relation avec la famille Geffray chez qui elle s’installe le 15 mars.

"Grand coeur et belle âme"

« Nous trouvons normal d’accueillir quelqu’un dit simplement Dominique Geffray. J’ai vu passer l’information sur le site de la Ville et nous nous sommes inscrits à La Maison Bleue. Nos enfants sont partis, les trois chambres sont libres, donc nous avons de la place. Et comme je suis à la retraite, j’ai du temps. » Depuis dix jours, la cohabitation se passe bien : « c’est comme si j’avais des amis à la maison, glisse Dominique. Nous allons au marché ensemble, nous avons fait un peu de tourisme également, en allant à Montoire-sur-le-Loir. Mais on sent bien que la situation est difficile pour elle et son fils. »

« Je m’inquiète forcément, confirme Ludmila. Je suis constamment sur mon téléphone pour avoir des informations, je parle à mon mari tous les jours. Je sais que nos voisins aussi sont partis… J’espère revenir en Ukraine rapidement mais je ne sais pas combien de temps va durer la guerre. Mais notre chance, avec mon fils, c’est d’être arrivée ici : les gens ont été vraiment accueillant et gentils. Je tiens à remercier les Français qui nous ont aidés, spécialement Dominique et Pascal. Je suis contente de les avoir rencontrés malgré les circonstances. Ils ont un grand cœur et une belle âme. »

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