En ce samedi 8 mai, nous nous retrouvons en direct pour célébrer, ensemble, le 76e anniversaire de la victoire des Alliés.

Ensemble, malgré la distance qu’impose la COVID, nous célébrons la Libération de la France.
Aucun virus et aucune crise sanitaire ne doit nous empêcher de célébrer ce 8 mai 1945, date inscrite dans l’Histoire de notre Nation et dans la mémoire collective comme la première étape vers une paix durable en France et en Europe.

Le 8 mai 1945, comme bien des dates historiques du XXe siècle qui fut marqué par la voix familière du Général de Gaulle, qui dans une intervention radiophonique annonçait aux Français : « La guerre est gagnée ! C’est la victoire des Nations unies et c’est la victoire de la France ! Pas un acte de courage ou d’abnégation de ses fils et de ses filles, pas une souffrance de ses hommes et de ses femmes prisonniers, pas un deuil, pas un sacrifice, pas une larme n’auront donc été perdus !

Honneur à notre peuple, que des épreuves terribles n’ont pu réduire, ni fléchir ! Honneur aux Nations unies qui ont mêlé leur sang à notre sang, leurs peines à nos peines, leur espérance à notre espérance et qui, aujourd’hui, triomphent avec nous ! »

A la Libération, la République tente de s’épurer des préjudices subis par les victimes directes de l’occupation et de la collaboration.

Une épuration défoulée, excessive dont l’issue dépassera les 1 500 condamnations à mort. Une vindicte populaire dont le symbole le plus marquant reste les 20 000 femmes tondues pour de supposées relations avec l’ennemi.

La France a besoin d’un coupable pour ces années d’occupation, d’impuissance et de collaboration.

Mais elle a aussi besoin de panser ses blessures, en refondant la République et en redéfinissant la démocratie.

Et si la France a de quoi se reconstruire, c’est grâce à sa Résistance.

Grâce à ces femmes et à ces hommes qui ont été jusqu’à donner leurs vies pour sauver leur patrie et ses valeurs.

C’est le cas d’une Pisciacaise que nous connaissons bien : Geneviève Brousset, dont je voudrais vous raconter l’histoire en ce 8 mai 2021. Une histoire qu’elle a couchée noir sur blanc dans un ouvrage paru récemment :

target="_blank" rel="noopener noreferrer">« Meurs où tu dois » rédigé par sa petite fille Sophie Clavières.

Une histoire dont certains ici connaissent bien certaines étapes puisque Geneviève Brousset a été depuis sa résistance une des grandes figures de la ville de Poissy. Maire adjointe, investie auprès des femmes pour la dépénalisation de l’avortement ou la protection des femmes battues et prostituées, engagée auprès des malades avec la création des premières ambulances de Poissy, les ambulances Sainte-Anne, Geneviève Brousset a d’abord été une emblématique résistante française.

Le 3 sept 1939, la France déclare la guerre à l’Allemagne. Pendant la « drôle de guerre » Geneviève Duchesne vit et étudie encore à peu près paisiblement à la montagne où sa mère l’a envoyée. Le mois suivant son grand frère s’enrôle.

En 1940 elle est ramenée à Paris auprès de sa famille. La campagne de France lancée par l’Allemagne le 10 mai 1940 est fulgurante, le nord est évacué, c’est l’exode. Immédiatement Geneviève et sa mère accueillent et soignent les réfugiés. Une vocation se construit en famille !

Quand Paris est assiégé, Geneviève et sa mère s’exilent dans le sud de la France par convoi militaire. Le voyage sera tumultueux et meurtrier. Avec  l’annonce du 17 juin 1940 de Pétain intimant la cessation des combats contre les allemands, l’Occupation s’installe et pénètre chaque jour un peu plus le quotidien des Français.

Il faut prêter allégeance au nouveau gouvernement. Les femmes sont renvoyées à la maison. Immédiatement chez les Brousset, femmes fortes et indépendantes, la Résistance s’organise. Dans les pas de sa mère, Geneviève Duchesne dissimule et poste des lettres de soldats français faits prisonniers par les Allemands ne sachant pas s’ils reverraient leur famille.

Geneviève résiste dès son plus jeune âge sur les ordres de sa mère, à l’école, à Paris, à la campagne, avec son frère…. Elle transmet et reçoit les messages de son réseau. Elle s’entraîne au combat avec des officiers britanniques du MI6. Elle assiste son frère opérateur radio qui code à l’attention de la résistance intérieure et extérieure plutôt que de s’abriter lors des bombardements… Elle produit de fausses cartes d’identités pour les résistants et les juifs.

La loi de Vichy du 25 octobre 1941 fait de la délation une obligation légale et les primes à la délation sont exorbitantes. Les primes placées sur la tête de son frère, de sa mère et la sienne vont de 800 000 à 2 millions de francs. Geneviève et sa mère collectent les lettres de délations interceptées par le réseau résistant de la poste et listent les noms de potentielles victimes ainsi que des auteurs avant de brûler les lettres : « Délice éphémère mais réel de voir réduite en cendres une part de l’horreur du monde » dira-t-elle.

Les actions menées par Geneviève Duchesne et sa famille concernent directement Poissy et ses environs :

A 12 ans, la cousine de Geneviève repart de chez elle avec le cartable rempli d’exemplaires du journal Résistance fondé par Marcel Renet en 1942, qui seront distribués par son père à l’usine Ford aujourd’hui PSA de Poissy.

Depuis la maison de leur oncle à Villennes-Sur-Seine, Geneviève et son frère font du camping stratégique pour récupérer les aviateurs américains cachés dans les champignonnières du Château de la Coudraie à Poissy et les conduire la nuit jusqu’à la Seine où se met en place un transit par barque allant jusqu’à Aubergenville.

Elle espionne le pont de Conflans-Sainte-Honorine très utilisé par les Allemands pour faciliter sa destruction par les résistants.

Rapidement conductrice pour l’organisation civile et militaire des jeunes elle use de son charme pour passer les barrages et ainsi permettre les plasticages de rails, les destructions de points stratégiques elle raconte que « les combattants posaient leurs bombes, se cachaient un peu plus loin jusqu’à l’explosion puis s’engouffraient dans la voiture qu’elle démarrait aussitôt ».

D’abord portée par l’insouciance de l’enfance et l’exaltation de ne jamais se faire prendre, c’est son courage et sa force de caractère qui ont permis à Geneviève Duchesne de ne jamais cesser son combat, de ne jamais cesser de résister.

« L’arrestation de mon frère preuve vivante du danger que nous courions tous les jours, m’a soudain fait prendre conscience de la dureté du monde réel, muselant l’inconscience de ma jeunesse. En quelques jours, j’avais pris dix ans » avoue-t-elle.

Tout au long de la guerre, malgré les dangers, Geneviève ne rentrera jamais dans le rang. Elle ne cessera jamais le combat.

En ce 8 mai 2021, c’est à elle que nous pensons particulièrement.

A elle et à tous les résistants. Ceux qui sont morts au combat. Ceux qui ont eu le bonheur de vivre le 8 mai 1945. Ces héros anonymes de la France combattante comme aimait les appeler le résistant Pierre Brossolette qui les salue dans son Hommage aux morts de la France combattante, le 18 juin 1943 :

« Colonels de trente ans, capitaines de vingt ans, héros de dix-huit ans, la France combattante n’a été qu’un long dialogue de la jeunesse et de la vie. Les rides qui fanaient le visage de la Patrie, les morts de la France combattante les ont effacées; les larmes d’impuissance qu’elle versait, ils les ont essuyées; les fautes dont le poids la courbait, ils les ont rachetées. »

Cette France combattante de 1942, cette France résistante, elle a tout juste 14 ans et la force de caractère de Geneviève Brousset quand elle participe aux réunions des groupes résistants de la première heure.

La France résistante, elle a 38 et 40 ans et le cœur des Pisciacais Antoinette et Marcel Loubeau qui sauvent leurs voisines Laja et Rachel Zylberberg du sort que la folie génocidaire nazie leur réservait.

La France résistante, elle a à peine 20 ans et la détermination de Roland Le Bail, lorsqu’il fonde, avec ses Compagnons d’armes, la compagnie Lemelle.
« Depuis un an, je travaillais le jour tandis que la nuit, on allait surveiller les Allemands à la gare d'Achères, raconte-t-il. Ensuite, on transmettait des renseignements sur le trafic ferroviaire au bureau de Paris et les infos partaient vers Londres. »

La France résistante, elle a 44 ans, le visage de Jean Moulin, figure de la Résistance française, président du conseil national de la Résistance, tué par la Gestapo en 1943, « sans avoir livré aucun secret, lui qui les savait tous. »

La France résistante, elle a le visage d’Edmond Michelet, résistant, déporté en 1943, survivant du camp de Dachau, fait Juste parmi les Nations. En son honneur, une promenade de l’éco Quartier Rouget-de-Lisle porte aujourd’hui son nom.

La France résistante, elle a le visage de ceux qui sont tombés pour notre liberté : Louis Lemelle, Georges Constanti, Jean-Claude Mary, Michel Jeunet, Albert Labbé, et tant d’autres.

 

Cette France résistante, elle nous habite toujours 76 ans après la fin des combats !

La France résistante aujourd’hui, elle a 44 ans et l’héroïsme du lieutenant-colonel de gendarmerie Arnaud Beltrame lorsqu’il sauve la vie de la dernière otage de l’attentat de Trèbes, en sacrifiant la sienne.

La France résistante, elle a 47 ans et le visage de Samuel Paty, chantre de l’esprit des Lumières et de la liberté d’expression qu’il n’a eu de cesse de transmettre à ses élèves, avant son insoutenable assassinat près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine le 16 octobre 2020.

La France résistante, elle a 49 ans et les traits de Stéphanie Monfermé, cette fonctionnaire de police lâchement assassinée dans son commissariat de Rambouillet, le 23 avril dernier, parce qu’elle incarnait l’ordre et la République qui ne s’inclinent pas devant ceux qui veulent changer nos modes de vie.

La France a résisté et elle résiste encore.

Hier face au nazisme, aujourd’hui face à l’islamisme et à l’obscurantisme qui veulent nous priver de notre liberté au nom d’une idéologie barbare et archaïque.

Me reviennent les paroles de Jacques Chirac, lors de son dernier discours en tant que Président de la République, le 23 avril 2007 :

« Ne composez jamais avec l'extrémisme, le racisme, l'antisémitisme ou le rejet de l'autre. Dans notre histoire, l'extrémisme a déjà failli nous conduire à l'abîme. C'est un poison. Il divise. Il pervertit, il détruit. Tout dans l'âme de la France dit non à l'extrémisme. »

Rien n'est jamais perdu tant que la flamme de la résistance continue de brûler dans le cœur d'un seul homme.

La France est plus forte lorsqu’elle est rassemblée. Lorsqu’elle fait Nation.

Résister face à toute forme d’extrémisme est une victoire en soi.

Le 8 mai 1945, la France résistante est victorieuse.

En ce 8 mai 2021, nous continuons le combat mais surtout nous continuons de nous souvenir de leur combat, qui est plus que jamais d’actualité.

Nous nous souvenons de l’humanité au cœur de l’horreur, de la force irréductible parmi les faibles, du courage face à la mort et du patriotisme face à l’eugénisme.

Résistance. Hier au nom de la liberté. Aujourd'hui au nom de la mémoire.

 

Vive Poissy,

Vive la République,

Vive la France.

 

 

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